Professeur d’études cinématographiques à l’Université de Berkeley, en Californie, Linda Williams publie en 1989 « Hard Core: Power, Pleasure, and the “Frenzy of the Visible” » considéré depuis comme l’ouvrage fondateur sur le cinéma pornographique. Abordant frontalement un genre devenu rapidement une industrie et une puissance économique, elle y a montré que le plaisir sexuel est systématiquement filmé d’un point de vue masculin. Fascinée par la représentation des corps (en mouvement), elle a développé une réflexion sur les Noirs au cinéma (Playing the Race Card: Melodramas of Black and White, from Uncle Tom to O. J. Simpson) avant de s’intéresser à ce qui meut et émeut le corps du spectateur face aux mélodrames et aux films d’horreurs (questionnant notamment les stéréotypes de genres). Avant de publier « Screening Sex » en 2008, elle dirige notamment l’ouvrage « Porn Studies » publié en 2004 qui met en perspective la pornographie de son apparition à ses variations contemporaines.
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Screening Sex
À partir des années 1960, le cinéma américain commence à sortir de sa longue adolescence : Elizabeth Taylor prononce des mots jusqu’alors interdits, Dustin Hoffman perd sa virginité dans les bras de Mrs. Robinson, Jon Voight fait le gigolo dans les rues de New York. À Hollywood, la sexualité fait enfin son apparition comme sujet et comme question de mise en scène. Comment représenter les rapports charnels ? Comment les intégrer à la narration et à la vie émotionnelle des personnages ? Quelle expérience le spectateur fait-il de telles scènes?
Dans son premier ouvrage traduit en français, Linda Williams questionne la dynamique historique et culturelle par laquelle certaines images à caractère sexuel, initialement considérées comme « ob/scènes », sont devenues « en/scènes ». Se concentrant sur le cinéma américain, elle envisage sa perméabilité à la représentation de la sexualité et met en perspective le rôle des codes de censure et leur influence encore palpable dans les réalisations contemporaines. Si vous vous demandez pourquoi les scènes de sexe made in USA peuvent à ce point paraître artificielles ou parallèles à la trame narrative, la réponse est peut-être bien plus simple qu’il n’y paraît.
Bien que l’ouvrage ne propose pas la totalité du texte de l’auteure, celui-ci se structure de manière chronologique levant le voile sur certains films d’exploitation et d’avant-garde avant de s’intéresser très judicieusement à la sexualité dans le cinéma « mainstream ». Entre souvenirs et analyses, contextualisation et comparaisons avec un cinéma européen décomplexé Linda Williams propose un fois de plus un point de vue extrêmement pertinent sur la question n’hésitant pas à renvoyer à Freud ou Foucault.
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Screening Sex – Ed. Capricci – 20€ – 264 pages – Format : 122 x 190 mm